Le 4 décembre 2012, nous étions plus d’une quinzaine de personnes à nous rencontrer chez ECTO pour découvrir ensemble en quoi l’approche agile, très connue et répandue dans le monde informatique, pourrait nous aider à être plus « thrivable ». Au cours de cette riche soirée d’échanges, Samantha Slade, co-fondatrice de Percolab et d’ECTO (la coopérative qui nous a accueillis), a partagé avec nous son expérience, issue de l’implantation de cette approche dans différents milieux.

Abstract flow – www.nice-cool-pics.com

Qu’est-ce que l’approche agile? C’est un nouveau paradigme, une nouvelle façon de concevoir la gestion de projet, le travail en équipe, et bien plus. Cette approche est née d’une constatation : les lourdes structures qui amènent à concevoir la gestion de projet comme une chute d’eau allant d’un point A à un point B, présentent de nombreuses limites, de nombreux dysfonctionnements et donnent naissance à toutes sortes de frustrations. Constatant cela, en 2001, dix-sept praticiens du développement de logiciel se sont rencontrés pour créer une alternative basée sur du sens commun. Ils ont identifié des lignes directrices à la fois simples et puissantes, logiques et intuitives, qui ont donné lieu à l’écriture du Manifeste pour le développement Agile de logiciels.

Le voici :

Manifeste pour le développement Agile de logiciels

Nous découvrons comment mieux développer des logiciels
par la pratique et en aidant les autres à le faire.

Ces expériences nous ont amenés à valoriser :

Les individus et leurs interactions plus que les processus et les outils
Des logiciels opérationnels plus qu’une documentation exhaustive
La collaboration avec les clients plus que la négociation contractuelle
L’adaptation au changement plus que le suivi d’un plan

Nous reconnaissons la valeur des seconds éléments,
mais privilégions les premiers.

Simple, clair, concis, quelques phrases qui révolutionnent la façon de concevoir la gestion de projets. Toutefois, bien que ces principes puissent sembler aller de soi, les mettre en application ne l’est pas, car cela implique de rompre des habitudes, des réflexes très ancrés dans de nombreux milieux de travail.

L’esprit agile repose sur quatre piliers principaux :

  • Collaboration massive : une invitation à repousser les limites de la collaboration pour collaborer davantage encore, à chaque étape du projet.
  • Équipes auto-organisées : un juste équilibre entre liberté et responsabilité, une grande confiance accordée aux membres de l’équipe, la reconnaissance des diverses expertises de chacun et des différents rôles qu’ils peuvent être amenés à jouer, des différentes tâches qu’ils peuvent réaliser.
  • Adaptabilité : planifier, jusqu’à quel point ? Si l’approche agile reconnaît l’importance de l’aspect structurant de la planification, elle valorise encore davantage la capacité d’adaptation, afin de saisir les opportunités qui se présentent. En brisant les structures aliénantes tout en conservant celles qui sont nécessaires, l’approche agile nous amène à évoluer dans une zone de chaordre, point de rencontre entre l’ordre et le chaos. Rigidité et agilité se complètent, quant à la structure légère, elle offre une grande liberté et favorise une expérience consciente. « La simplicité – c’est-à-dire l’art de minimiser la quantité de travail inutile – est essentielle », c’est l’un des principes qui sous-tend le Manifeste.
  • Approche itérative : cette approche amène à concevoir un projet de façon cyclique, ce qui permet la création de nombreux petits livrables de grande qualité et de célébrer régulièrement les avancées. Lors d’un échange en petit groupe, quelqu’un a souligné le fait que la nature fonctionne elle aussi par successions de cycles qui se répètent. En imitant cela, les organisations se rapprochent donc davantage des systèmes vivants.

Comment cela se traduit-il concrètement ? Il existe toutes sortes de techniques et d’outils inspirés de l’approche agile, scrumy a été cité en exemple, à chaque équipe de trouver ceux qui lui conviennent le mieux.

High velocity cheetah – www.nice-cool-pics.com

Mise en situation pour illustrer un fonctionnement agile : une équipe commence un nouveau projet, le divise en un certain nombre de phases, chacune comprenant plusieurs tâches à accomplir. La planification est réalisée par périodes de deux semaines. Tout au long de la démarche, les membres de l’équipe connaissent l’intention qui les guide, la destination finale, mais leur attention est centrée sur les tâches à accomplir dès maintenant. L’ensemble des tâches identifiées sont disposées au centre de la table et peuvent ainsi être priorisées. Pour commencer la journée, l’équipe se rencontre debout, pendant quinze minutes, ce qui favorise concision et efficacité. Chacun partage ce qu’il a réalisé la veille et ce qu’il souhaite accomplir le jour même. Il choisit certaines tâches. Si le jour précédant une tâche lui a posé problème, il peut la remettre au centre pour qu’un autre membre de l’équipe s’en charge. Ainsi, rien n’est oublié, laissé de côté ou bâclé et l’équipe se complète. Le rôle d’un gestionnaire de projet dans une équipe agile revient à faire preuve de créativité pour retirer les obstacles qui compromettent l’avancée de l’équipe. Il doit aussi apprendre à faire confiance à son équipe, lui permettre de s’autoréguler, et favoriser la communication entre ses membres.

Le plaisir de choisir ce que l’on va accomplir aujourd’hui, demain, dans les prochaines semaines, me semble être un élément particulièrement puissant et porteur de cette approche. En choisissant une tâche plutôt qu’une autre, l’individu est amené à reconnaître ses forces, ses faiblesses, ses intérêts, ses envies. L’approche agile permet à chacun de se réinventer au fil du temps. Si aujourd’hui je ressens l’envie d’écrire un article, il est fort possible que demain je souhaite réaliser quelque chose de différent. Quelle belle façon d’éviter de tomber dans le piège d’un quotidien routinier et de rester à l’écoute de ses envies, de ses rêves, de ses passions!

Lors de la présentation de l’approche agile, l’une des personnes présentes s’est exclamée : « C’est presque un mode de vie! ». En effet, implanter cette approche dans un milieu revient à transformer les dynamiques humaines et peut-être même la façon de concevoir le monde. Réaliser une transition vers l’approche agile demande du temps et des efforts puisqu’il s’agit de passer d’une culture de travail à une autre, toutefois, lorsque cette transition est réalisée, les améliorations sont considérables. Les livrables sont de meilleure qualité, l’efficacité au sein de l’équipe augmente et le climat de travail se transforme. Les résistances parfois observées lors de l’implantation d’une telle approche sont compréhensibles, le changement peut être déstabilisant. L’une des participantes a dit se sentir complètement perdue, mais d’une bonne façon, a-t-elle précisé. Plusieurs d’entre nous avions cette même impression de connecter, ou plutôt de reconnecter à des approches qui sont déjà présentes en nous intuitivement, à travers un vocabulaire formalisé qui le rend explicite. Cette conversation nous a aussi rappelé l’importance de faire preuve de compassion, envers les autres et envers nous-mêmes, pour que la transition vers de nouvelles façons d’agir et d’interagir, se réalise en douceur.

Rose arc-en-ciel – www.roserosae.centerblog.net

Share →